CriTiQue 0040 : chacun chez soi

 




Salutations,



Après David S. Goyer (avec ‘Foundation’ dont vous pouvez lire ma critique ici), c’est au tour d’un autre nom ronflant de la SF de passer par mon salon : Simon Kinberg.

Et c’est mon triste devoir d’annoncer que, contrairement à son collègue scénariste, je n’aurai pas l’occasion de me montrer très enthousiaste sur l’empreinte qu’il va laisser sur la pop culture.

En effet, Kinberg est surtout connu pour son travail sur les ‘X-Men’ et il est malheureusement associé aux pires exploits de la troupe de mutants en collant qu’à leurs meilleures heures.

Jugez plutôt : le pauvre est responsable de ‘The last stand’, ‘Apocalypse’ et ‘Dark phoenix’ !

(’Jumper’, et ‘Fantastic four’, dans leur désastreuse dernière itération, étant également inclus dans ses ‘faits d’armes’…)

On n’est pas sûr de l’inoubliable, vous en conviendrez !

Allez, pour être tout à fait transparent, je vais quand même dire qu’il a également été à la plume de deux films aux résultats bien plus concluants : ‘Days of future past’ (le meilleur ‘X-Men’ au cinéma ?) et ‘Sherlock Holmes’ (la version de RDJ).

 

Voilà pour le curriculum du bonhomme, venons-en à son dernier méfait !

Une série ‘Apple TV+’ qui est décidément décidé à s’imposer comme un player incontournable dans le game du streaming, quelques fois avec succès (‘For all mankind’) et quelques fois sans…Comme, par exemple, la série qui nous occupe là maintenant tout de suite…

Pourtant, sincèrement, il n’y a pas beaucoup de récits qui m’enjaillent plus qu’une bonne grosse vieille histoire d’invasion extra-terrestre, avec ses résistants qui s’unissent, cette nouvelle vie qui s’organise, l’horreur qui fait place à la résilience... De ce point de vue, et je le mentionnais déjà lors de ma critique sur 'Y – Le dernier homme', « Falling Skies » est pour moi un sommet du genre ! (Mais si vous cherchez un exemple de ce qu’il ne faut PAS faire dans une série ayant pour objet un envahisseur ‘alien’, je vous invite à lire la critique que j’avais faite sur le remake de ‘V’)

 

Quel est le problème ?

« Invasion » prend le parti d’une intrigue chorale : on suit une poignée de personnages éparpillés dans le monde, apprenant à les connaître alors que plusieurs évènements bizarres viennent bousculer les tracas de leur quotidien (vous savez, des tracas : la mort, la guerre, l’adultère, le harcèlement et la retraite…que des choses légères quoi !) 

Il n’y a pas encore si longtemps que cela, quand on voulait évoquer une menace globale, on se contentait de quelques plans mal torchés des monuments importants (rappelez-vous : une succession d’images de la tour Eiffel, du kremlin, de la muraille de Chine et des pyramides de Gizeh)… Ici, que nenni ! Vous aurez droit à un portrait en profondeur et en nuances…Il est tellement profond et nuancé en fait qu’on arrive à la fin du premier épisode sans être vraiment sûr de ce qu’on regarde !

Oui, car je vais vous épargner toute forme de suspense inutile : pour une série qui est censée parler d’invasion (c’est dans le titre quand même, Madame !), et bien on n’en parle pourtant pas des masses ! En fait, il faut carrément attendre la toute fin du deuxième épisode pout avoir enfin un aperçu de la menace titulaire… Ca n’aura pris que 1h40…

Bon, le show se veut une exploration à échelle très humaine d’une menace globale…pourquoi pas ? Ce n’est plus très exactement du jamais vu, mais pourquoi pas !

Malheureusement, il eut, pour cela, été utile de nous donner autre chose que cette collection de clichés : entre le gamin sensible et fragile qui se fait évidemment harceler par la petite frappe de service, la famille ‘Nutella’ avec réveil du papa, en sautant sur le lit, par les deux espiègles bambins parfaits et le flic à la retraite dont le dernier jour est chamboulé ; il faut avouer qu’on n’est pas servi !

Si on dépasse cet état de fait, on reste sur des portraits de bonne facture, mais en voulant ménager ses effets, en se vautrant un peu trop confortablement dans le ‘slow burn’, la série oublie que pour aller au bout de ses intentions, elle doit être plus que la somme de ses parties : elle doit être en même temps un drame familial ET un récit d’invasion ; pas tantôt l’un et tantôt l’autre (avec des réussites très inégales qui plus est).

« Invasion » pourrait s’appuyer sur son montage pour l’aider à construire une tension digne de ce nom, mais c’est loin d’être le cas : à chaque fois qu’elle arrive à initier un momentum, la scène se coupe –certainement dans le but d’installer un suspense ; mais c’est l’effet indésirable qui se produit, loin d’être engagé dans l’intrigue, on est irrité. 

 

Donc, histoire de sauver quelque chose, on va parler du casting !

Il est composé de têtes relativement inconnues mais cela sert le propos : on n’a pas de mal à s’identifier à ces ‘quidams’ qui nous transportent dans leur vie de manière convaincante.

Je vais mettre en avant Rinko Kikuchi, pour faire une parenthèse, car elle fait le lien avec une autre histoire à l’ambition chorale internationale : « Babel ».

A mon sens, c’est à ce résultat de destin gracieusement lié que la série aspire mais s’il faudra bien sûr attendre les derniers épisodes pour poser une conclusion sur sa réussite, je ne peux que constater qu’on est mal embarqué…

Fin de la parenthèse.

Je finis mon petit tour par l’inévitable Sam Neil qui officie en tant que star bankable du lot et qui le justifie avec une prestation qui donne envie d’en voir plus (il est malheureusement absent du deuxième épisode) : personne ne vend les moments ‘WTF is going on’ mieux que lui ! (pour référence, retournez voir le moment dans ‘Jurassic Park’ où il voit les dinosaures pour la première fois !)

 

La série n’est pas franchement mauvaise et pourrait se révéler en trouvant un meilleur équilibre entre les genres qu’elle veut incarner mais vous l’aurez compris : ce sera sans moi…

Je sais que j’expliquais dans ma dernière ‘lluBiE’ que je m’accroche quelques fois à un show en dépit du bon sens, mais celui-là n’a tout simplement pas ajouté assez de grains à moudre dans ma machine à créer des obsessions inutiles…

 


En vous remerciant, bonsoir !

lluBiE 0010 : qui cherche trouve

 




Salutations,


On a tous une série à laquelle on s’accroche un peu en dépit du bon sens, dont on reconnaît la flagrance des défauts sans que cela suffise pour arrêter les frais.
Je me suis plusieurs fois infligé ce triste rodéo et voilà déjà un petit temps que je projette de vous parler du dernier en date.
J’ai nommé « Titans ».
La diffusion du dernier épisode de la troisième saison me semblait le moment opportun pour se faire et j’ai donc décidé d’attendre cette occasion malgré le fait que je pensais savoir, dans les grosses lignes, ce que je voulais dire de ce show qui ne manque décidément jamais de me faire poser des questions sur mon degré de masochisme…
Le moment étant venu, je me suis rendu compte qu’en parler était plus facile à prévoir qu’à faire.
En effet, armé de mon stylo bille, essayant de rassembler mes idées en m’appuyant sur la conclusion de cette 3ème fournée, j’ai très vite compris que cela n’allait pas être chose aisé de décrire une série qui ne sait pas elle-même où sa queue et sa tête se trouvent (ou même encore, si elle a l’un ou l’autre…)
Comme souvent dans mes ‘lluBiEs’ on va s’aventurer sur territoire jonché de possibles ‘spoilers’, vous lirez donc la suite à vos risques et périls…

Pour expliquer mon acharnement à regarder une série qui a plus de défauts que ‘Joffrey Baratheon’, il faut parler de la saison 1.
Globalement bonne (voir très bonne), elle introduisait un Dick Grayson fraichement affranchi de son mentor schizophrène à tendance chiroptophobe.
Ayant laissé Gotham derrière lui, il est maintenant policier à Détroit où il essaye tant bien que mal de rester du ‘bon côté de la justice’.
Néanmoins, le garçon semble se débattre avec ses velléités d’abandon de combinaison en latex galvanisé et ses errements le mettent sur le chemin de Rachel Roth.
Déjà vu ? Effectivement ! Mais entre cette Rachel qui semble avoir besoin d’un exorcisme en bonne et due forme, un gamin qui se transforme en tigre vert, une belle jeune femme amnésique ET pyrokinétique, sans oublier le fait que l’ancien protégé de ‘Batman’ va demander de l’aide à ‘Wondergirl’; la série reste constamment sous haute tension, prenant rarement la peine de s’arrêter pour souffler : les épisodes font l’objet d’un traitement en forme de ‘page-turner’ où chaque chapitre pose autant de questions qu’il n’en adresse.
On semble bien là, non ?
Bin non.
Car la décision, motivée par la garantie de production d’une suite, de réduire ce premier cycle à 11 épisodes au lieu des 12 prévus va complètement chambouler la série…
Vous pensez peut-être que ce n’était pas rédhibitoire, et cela serait vrai si le but de la manœuvre était de continuer d’étoffer la storyline sur laquelle on était engagé et qui, sans être d’une originalité folle, avait au moins pour elle de poser des enjeux forts.
Manifestement, le but était ailleurs… Où ? Impossible à dire car, après avoir hâtivement résolu le cliffhanger de la saison 1, la série prend une toute autre direction ; faisant passer le suspense qu’elle a installé comme un passage inutile avant d’en venir au fait.

Cette première erreur d’appréciation n’est malheureusement pas la dernière pour une saison qui tombe dans le piège classique des secondes saisons : l’envie de faire ‘plus’ ! Plus grand, plus fort, plus beau…
Ici, entre la réformation officielle des ‘Titans’ (qui fait office de prétexte à explorer les sombres raisons de leur séparation initiale), l’introduction du méchant ‘Deathstroke’ (qui après l’authentique démon menaçant d’asservir l’humanité fait un peu pâle figure, tout ‘super-augmenté’ soit-il), La présence de Bruce Wayne (qui, ne semblant plus quoi faire avec ses ‘Robin’, le refile à Dick sous un prétexte aussi inutile que la présence du milliardaire l’est dans une intrigue déjà surchargée), l’arrivée de Conner Kent (Clone hybride de l’autre Kent et de Lex luthor…sans en dire plus, vous comprendrez à quel point l’intronisation d’un tel personnage est vorace en temps d’écran), L’infiltration des ‘Titans’ par la fille de ‘Deathstroke’ (une borgne également ‘super-augmentée qui va s’amouracher du futur ex ‘Robin’ que Bruce a collé aux basques de Dick), sans oublier (quand même) la continuation du cheminement personnel des personnages de la première saison (et non des moindres, les circonstances qui pousseront Dick à devenir ‘Nightwing’) ; on a largement dépassé la limite de ce que 13 épisodes peuvent véhiculer en gardant un semblant de cohésion.
Les storylines se trainent donc sans pouvoir se décider sur un point de focale, laissant l’intrigue en perpétuel déséquilibre pour se terminer en pétard mouillé.
Néanmoins, on va dire que l’essentiel est sauf à la fin : Grayson devient ‘Nightwing’ et les ‘Titans’ forment enfin une véritable équipe…

Ce qui nous amène à la saison 3.
Bonne nouvelle : les showrunners semblent enfin avoir compris qu’ils ne pouvaient pas rendre justice à autant de personnages à la fois et font le ménage en conséquence !
Mais malgré cette bonne intention, ils se prennent une fois de plus les pieds dans le tapis : alors qu’elle devrait, en toute cohérence, faire partie des ‘Titans’ ; une protagoniste centrale de la saison précédente disparaît ainsi complètement du tableau, comme si elle n’avait jamais existé ; laissant un arrière-goût désagréable de désaveu total du chapitre 2.
Pire encore, après un premier épisode qui expédie (excusez du peu) la mort de Jason (second ‘Robin’), la mort du ‘Joker’ et la mise en retraite de ‘Batman’ ; la série semble pourtant encore peiner à justifier la présence d’autant de personnages à l’écran.
De fait, il aurait été, à mon sens, plus judicieux de se passer des services d’un ‘Superboy’ (qui faisait déjà office d’appendice inutile dans la saison précédente) et qui, avec les mêmes pouvoirs que ‘Superman’, rend la mise en place d’un suspense à la mesure de son omnipotence quasiment impossible.
C’est tout ?
Malheureusement non ! Permettez-moi un dernier passage en revue assorti de quelques chiffres.
Car même en acceptant de passer au-dessus des 4 (sur cinq !) morts (dont une dans la saison 2) qui trouvent TOUS le moyen de revenir à la vie et sur, non pas un, mais deux épisodes complets qui se greffent à peu près aussi efficacement sur l’intrigue générale qu’un nez à l’arrière du genou ; on a toujours pas évoqué tous les problèmes qui ankylosent l’intrigue (spoiler alert, il y en a 6 !):

En effet, malgré un casting impeccable (Vincent Kartheiser qui après « Mad Men » montre ici une face étonnante de sa palette), le ‘vilain’ central de cette année empile les clichés et finit par tomber dans la caricature (1). Le personnage de ‘Starfire’ reste globalement décevant : elle perd et regagne ses pouvoirs à chaque saison sans que je ne comprenne jamais comment et pourquoi…sans parler du fait que son histoire familiale qui, sans être franchement passionnante, occupe pourtant une place importante de son temps d’écran (2). Cette version de Jason et ses atermoiements psychotiques auraient définitivement leur place dans ‘les feux de l’amour’ (3).Un TROISIEME ‘Robin’ est inutilement introduit (à ce stade, ça devient du fétichisme) (4). Après un passage en prison, sous prétexte de faire son introspection, qui frisait le ridicule lors de la saison 2 ; Dick est carrément obligé de mourir pour comprendre que…Euh bin en fait, ce qu’il a compris n’est pas clair…(5)
Il me reste encore à mentionner l’absence presque totale de Rachel, qui porte un coup presque fatal à la cohésion de l’ensemble des trois saisons (6) ; avant de préciser que je pourrais continuer !
Mais je vais m’arrêter là, je crois que tout le monde a compris : niveau qualité, on est loin du compte...

Une seule bonne chose à mettre en avant : Barbara Gordon !
Pertinemment jouée (Savannah Welch que j’espère revoir), assez bien écrite ; la relation qu’elle a avec Dick et surtout sa résolution sont LA bonne note de ce désastre.
Cette bonne note entretient une petite flamme d’espoir : une saison 4 est bel et bien prévue et je ne peux pas jurer que je ne m’installerai pas devant.
Alors, j’en conviens, après un tel portrait, c’est difficile à comprendre...comme je l’écrivais au début, je dois bien avouer qu’il faut que je me pose des questions sur d’éventuelles tendances masochistes chez moi !
Mais au final, mon vrai masochisme, c’est de continuer à espérer…(ah, comme c’est beau !)
Ce que j’espère, c’est qu’après autant de tâtonnements, les showrunners vont finir par trouver la bonne formule pour mettre en avant ces personnages qui, à la base, sont attachants.

Oui, la prochaine tentative sera la bonne… Qui cherche trouve… Non ?

 
En vous remerciant, bonsoir !

criTiQue 0039 : d'un goût à l'autre

 



Salutations,


Bienvenue à Hollywood !

Nous suivons ici Lisa Nova, une jeune femme comme il en existe des dizaines de millions : avant longtemps, elle va faire confiance à une enflure.
Pas exactement nouveau...
Un peu de la même manière, « Brand new cherry flavor » a d’abord l’air du même show qu’on a mille fois goûté.
Mais ne nous emballons pas, comme je le laissais entendre, la série se déroule à ‘Hollywood’...Et, là-bas, tout est trompeur... surtout les apparences !
Lisa va donc se faire rouler par un producteur, un ‘has-been’ en devenir qui cherche de plus en plus désespérément un moyen de retrouver son lustre d’autant. Aussi, quand une nouvelle opportunité se présente sous la forme d’une jolie aspirante réalisatrice, il n’hésite pas à la prendre sous son aile en lui promettant monts et merveilles.
Un homme qui aide une jolie femme sans autre motif que de l’aider est une denrée rare, voire un mythe ; et Lisa apprend à ses dépens que ce cliché n’en est pas un par hasard (et à fortiori dans le monde du cinéma) : ses droits artistiques sur son court-métrage sont compromis quand il devient clair qu’elle ne se laissera pas passer à la casserole par son mécène.
L’enflure mérite donc une bonne leçon...Et il va la recevoir... Mais comment s’y prendre ?
 
Voilà pour l’incipit, mais que cache cette lecture plate du commencement de cette histoire ?
 
Dès les premiers instants, au-delà de sa relative naïveté, il apparaît clair que la miss est à part. Ce qui amène d’ailleurs quelques personnes aux mœurs étranges à lui vouer un intérêt malsain. Ces apparitions sont à la fois intrigantes et agaçantes : on nous tease un peu lourdement, tantôt de manière maladroite (elle est suivie par l’inévitable gars à moto qui reste dans l’ombre), tantôt de manière clichée (elle se fait accoster par la folle de service qui lui explique qu’elle peut ‘faire du mal à ceux qu’elle souhaite’) ; que cette fille un peu niaise sous ses grands airs de ‘no-nonsense, no bullshit’ recèle quelque chose de spécial.
Et vous venez, sans vous en rendre compte, de lire la seule critique que j’ai à formuler sur cet épisode...
Elle n’est pas d’une violence rare, vous en conviendrez...
Car s’il ne fait aucun doute que la série prend son temps pour amener sur le devant de la scène ce qui fera son sel, il est tout aussi certain que le jeu en vaut la chandelle : on finit par basculer complètement ailleurs, loin (très loin) des préoccupations finalement triviales d’une réalisatrice en quête de sa chance.
On finit dans le bizarre et l’inquiétant, dans le glauque et le mystérieux ; avant qu’on ne s’en rende compte, on est dans un monde qu’on va avoir du mal à quitter, qui exige qu’on continue à le découvrir...malgré l’angoisse et la répugnance, malgré la peur et le malaise, on sait qu’on va rester.
Je me rends compte que c’est à mon tour de faire de l’aguichage maladroit, mais en toute honnêteté, on a ici affaire à un animal bizarre qu’il vaut mieux apprivoiser soi-même.
 
De toutes manières, « Brand new cherry flavor » a plus à donner qu’un univers biscornu !
Tout d’abord, un premier rôle impeccable de bout en bout !
Je vais essayer de modérer mon admiration... Ou pas, car Rosa Salazar (Lisa Nova donc) passe d’un bout à l’autre d’un spectre émotionnel aux allures de grand écart avec une intensité dans son regard noir tout bonnement magnétique. Elle est un point d’ancrage sans faille, nous guidant de plus en plus profondément dans ce qu’on peut difficilement éviter de décrire un peu sempiternellement comme le terrier du lapin.
Voilà, je vais m’arrêter là, je crois que c’est clair : je l’ai trouvé parfaite dans un rôle qui tient du numéro d’équilibriste.
Mais le reste du casting est au diapason : Catherine Keener et Eric Lange font le job avec assurance et juste ce qu’il faut de folie pour garantir une immersion sans faille !
(Et juste parce que ça fait quand même toujours bizarre de l’entendre parler, je vais aussi mentionner qu’on peut y voir Manny Jacinto, l’hilarant ‘Jason Mendoza’ dans l’excellent ‘The good place’)
 
Ensuite (et surtout), comment ne pas mentionner la manière dont l’histoire se dévoile en exploitant les faux-semblants. Rappelez- vous, on est à Hollywood, et la série se sert de ce fait pour nous garder dans un état de doute perpétuel sur ce que l’on voit.
Chaque personnage joue sur sa dualité, exhibant des attitudes dont on ne peut jamais être sûr qu’elles ne soient pas un rôle joué dans le seul but d’atteindre un objectif.
L’enflure/producteur nous rappelle sans cesse cette évidence : tout le monde est en quête de quelque chose en ce lieu où les apparences font office de réalité...Tout est faux et tout est vrai, la seule variable est ce qu’on cherche à obtenir.
De fait, rien ne semble jamais acquis dans ce foutraque jubilatoire : les gens ne sont pas ce que l’on croit, les échecs se transforment en succès (et vice-versa), le burlesque se mue souvent en horreur (là encore, l’inverse est tout aussi vrai),… J’en passe et des meilleures.
Heureusement, il y a un fil d’Ariane ; quelqu’un qui vit au premier degré tout ce qui lui arrive : c’est dans le personnage de Lisa que se trouve certainement la réponse aux nombreuses questions que l’on se pose en regardant cet exercice maitrisé.
Un autre personnage, celui de 'Boro' (qui, si on voulait persister à tracer un parallèle avec ‘Alice aux pays des merveilles’, tiendrait le rôle du lapin blanc), nous en informe d’ailleurs (en s’adressant à Lisa, mais elle pourrait tout aussi bien s’adresser à nous) :
" It’s going to be a little fucked up, but the good news is : it will only get as fucked up as you are…"

 
En vous remerciant, bonsoir !

criTiQue 0037-38 : Battle Royale

Pré scriptum : Comment ? Oui, je vous pose la question : Comment éviter de parler de « Squid game » ?
Pas possible ?
Bon ok, puisque Mr Hollywood…
Attendez… Ça me fait penser… Mr Hollywood a certainement changé de nom ces dernières années : il se fait sans doute appeler ’Mr Streamy’ maintenant !
On reprend donc :
Puisque Mr Streamy a trouvé le moyen de tous nous forcer à considérer le ‘jeu du calamar’ comme un objet de curiosité, je ne vais pas vous laisser tomber ; je vais vous aider à répondre à la seule question qui mérite d’être posée : est-ce que « Squid game » vaut la peine d’être regardée ?
Pour se faire, je vous propose de rester dans le thème en organisant une ‘Battle Royale’ !

Aujourd’hui, dans mon salon, c’est :

« Squid game » VS « Alice in borderland » !!

Les deux séries partent exactement du même principe : des participants à un jeu tordu se font zigouiller s’ils ont la mauvaise idée de perdre…
Etant sorties à moins d’un un intervalle, ça me paraissait un juste retour des choses de les faire s’affronter dans un combat à mort !
J’ai donc regardé le premier épisode de mes deux concurrents et ma sentence sera irrévocable (comme dirait l’autre) : je n’en continuerai qu’une !





Salutations,



A tout seigneur, tout honneur !
« Squid game » est devenu la série la plus regardée de Netflix cette semaine : près de 111 millions de personnes ont visionné au moins un bout de la série au cours de ses 17 premiers jours de disponibilité ! Oui madame, rien que ça !
(Au passage, je précise qu’elle a détrôné la série « Bridgerton » dont l’histoire tient en une question existentielle : « comment le personnage joué par Regé Jean-François (ou peu importe son nom…) en est venu à inventer la contraception pour homme ? »)

C’est donc avec ‘SG’ que je vais ouvrir le combat :
On suit les déboires de Seong Gi-hun dans un portrait qui ne s’embarrasse pas de nuances : cet homme est un raté dans tous les sens du terme.
Je l’ai déjà dit maintes fois (et je le redirai encore) : l’enjeu primaire pour moi quand je regarde une série, c’est de savoir si je peux m’accrocher aux personnages, développer une empathie pour eux qui me pousse à continuer de regarder l’histoire dont ils font l’objet.
C’était ma crainte principale avant d’appuyer sur ‘play’ et je dois dire qu’elle était largement infondée : qu’est-ce qu’il est attachant ce con !
Pas de problème, donc, de ce point de vue-là : quand il en retourne que notre parieur invétéré s’est mis dans des draps sur lesquels je n’oserais pas mettre le chien de mon pire ennemi, on ne manque pas d’envie de voir comment il va s’en sortir.
Le hic, c’est qu’on n’a pas vraiment le temps de s’en faire pour notre couillon de service.
Il est enlevé, et alors qu’on devrait commencer à baliser ; on comprend tout, tout de suite : bien sûr qu’il est prisonnier et, évidemment qu’il va devoir ‘jouer’ ! On sait 10 minutes avant lui ce qui l’attend et ça ne me dit rien qui vaille !
Bon, ce n’est pas encourageant, mais je m’accroche : cette série n’a certainement pas été regardée 111 millions de fois pour si peu !
Il doit y avoir quelque chose dans cette histoire de tellement dingue, de tellement profond que je suis sur le point d’avoir un retournement de nouille presque transcendantal !
Mais c’est là que le proverbial bât a blessé : j’ai eu beau essayer, j’ai eu du mal à voir quelque chose de transcendantal dans cette série qui m’a semblé plus préoccupée à passer en revue sa série de ‘check point’ qu’à raconter une histoire :



-Esthétique pop immédiatement reconnaissable (et future ‘it’ costume pour halloween) : check !

-Détournement de jeu enfantin pour créer un décalage malsain : check !

-Ralenti systématique à grand renfort d’hémoglobine : check !

-Personnage masqué bien glauque et drapé de mystère qui semble se délecter du spectacle : check !

-Un ensemble de personnages dont le profil (entre autres : une bonne poire qui veut revoir sa fille, un intello à lunettes qui va trouver les failles, une nana badass au passé trouble, un criminel prêt à tout pour partir et un petit vieux qui n’a plus rien à perdre) sont autant de clichés taillés au millimètre pour que les trahisons les uns envers les autres soient tantôt tragiques, tantôt jouissives mais rendues inévitables par la survie…(check !)


Bon, je pousse un peu. Soyons de bon compte : cette petite liste fait le taf et il ne faut pas être grand clerc pour comprendre pourquoi la série fait un tel buzz.
On a donc un personnage sympathique et une série de check-points pour trend rapide qui a valeur de cahier des charges réussi : cela donne un show divertissant… Mais est-il pour autant indispensable à regarder ?
Vous l’aurez deviné (ou pas), pour moi, la réponse est non.
Car je n’ai pas mentionné « Battle royale » dans le titre juste parce que ça faisait cool : cela fait maintenant presque 20 ans que le film est sorti en Europe et, depuis cet objet culte (que je vous conseille) a été l’inspiration de nombreux ouvrages visuels.
Ce n’est pas un problème en soi que ‘SG’ l’expose aussi ostentatoirement comme partie fondatrice de son ADN mais pour qu’une série qui revisite les thèmes développés dans son œuvre séminale en vaille réellement la peine, il faut qu’elle soit une valeur ajoutée au propos, qu’elle en fasse une relecture pertinente, moderne ou un tant soit peu subversive.
La conclusion s’impose d’elle-même : non seulement je ne pense pas que ce soit le cas, mais qui plus est ; je doute fortement que la suite, au-delà de tous les rebondissements et de l’horreur qui sont à coup sûr au programme, puissent me faire changer d’avis.
Seule la perte inévitable de l’innocence de ce brave Seong Gi-hun et le fait d’être témoin de sa mue, probablement à la toute fin de la saison, me semble modérément intéressante… Cela pourrait me pousser à la curiosité, mais ça dépendra de facteurs complètement extérieurs à la série (à savoir : si j’ai du temps à perdre !)

Voilà pour « Squid game »…Voyons si son adversaire du jour se débrouille mieux :



En démarrant « Alice in borderland », difficile de ne pas constater qu’on est également parti sur des clichés faciles : le gamer sans notion d’avenir, la petite frappe aimant à problème et le fonctionnaire en train de mourir d’ennui.
Mais ce sentiment ne perdure pas : une scène sans paroles de 30 secondes vaut parfois une exposition de 15 minutes et c’est le cas ici : l’installation se fait rapidement, à l’aide de quelques scènes bien calibrées, presque belles ; on devine la profonde amitié de nos 3 comparses avant que tout bascule.
Cette faculté d’évoquer du ressenti rien que sur le visuel me laisse une meilleure impression ! Et elle continue de s’affirmer quand le mystérieux évènement initiateur de l’histoire se produit: le moment de silence presque total alors que nos anti-héros découvrent qu’ils semblent tout à coup être complètement seuls dans leur mégapole est plus parlant que beaucoup de longs discours.
Reste à voir où cela mène… Ou pas en fait car, ici, le mystère prédomine ! On ne comprend pas tout de suite ce qui se passe et ça aide grandement à l’immersion : on est aussi confus que les personnages, on découvre leur condition en même temps qu’eux.
Pas pressé d’en venir au fait, la série prend le temps d’ancrer les protagonistes dans leur nouvel environnement. On les voit revisiter leurs anciennes vies tels des fantômes, et on n’est pas très sûr de savoir s’ils sont seuls ou invisibles ; là encore, le visuel laisse la place à l’exposition au lieu d’un quelconque dialogue ! Cette série comprend décidément son potentiel dramatique, elle ne ressent pas le besoin de s’appuyer sur des artifices trop lourds (par exemple, mais au hasard hein ! Des costumes au visuel claquant…) et c’est salutaire, car on reste au fond sur une histoire déjà vue et revue.
Mais quelle histoire en fait ?
La survie pardi !
Ici pas de méchant masqué qui observe avec son whisky 50 ans d’âge (pas dans ce premier épisode du moins), tout se fait de manière impersonnelle, à travers des écrans.
Ils représentent une présence écrasante, omnisciente. Ils sont partout, tout le temps ; ils sont une ligne de vie et le vecteur de l’angoisse. La menace qu’ils incarnent reste donc diffuse et cela renforce la confusion : au-delà des évidences (les enjeux de survivance ou de trépas immédiat) impossible de comprendre ce qu’il se passe réellement, et encore moins qui ou quoi se cache derrière ce cauchemar.
Mieux encore, le timer qu’ils exhibent infuse une bonne tension, on est ici dans une sorte de « Cube » (1997…ça date pas d’hier non plus ! mais coup d’essai, coup de maître pour Vincenzo Natali) sous stéroïde et cela fonctionne du tonnerre !
Tout ceci étant dit, on reste bien évidemment sur les mêmes dilemmes éculés : « oooh mon humanité m’empêche de faire ce que je dois faire pour survivre… » *5 minutes plus tard* « …RAF, t’as qu’à crever, bâtard ! »
Et, au final, restons honnêtes : cette série, pas plus que la précédente, n’a, je pense, le potentiel d’apporter une relecture du genre.

Mais il y avait match, et je dois décider du vainqueur…

Le doute ne devrait pas vous être permis en arrivant à ce stade (je profite de l’opportunité pour m’excuser de la longueur de ce billet) : j’ai été plus convaincu par la deuxième variation du thème ! (Sans, pour autant, être réellement conquis...)
Reste donc à voir si « Alice in borderland » peut tenir les promesses qu’elle fait!
L’espoir est permis : la fin tease (on reste dans la suggestion) qu’on est dans une histoire plus large, semblant indiquer que le show en a gardé sous la pédale.
Néanmoins, je dois convenir que le style est fragile, et l’ensemble peut tout à fait s’écrouler comme un château de cartes au moindre effet de manche trop facile.
Mais, ici, point de prédiction facile ! Pour connaître la suite, une seule solution :
Continuer à regarder !


En vous remerciant, bonsoir !

lluBiE 0009 : avec le temps...



Salutations,

 

 

Je ne sais pas pour vous mais, dernièrement, j’ai de plus en plus de mal à sentir le pouls de la musique.

Je ne veux pas dire par là qu’elle est morte, ou même moribonde…ou toute autre assertion tout aussi vide de sens...

Ce que je veux dire c’est que le paradigme musical a irrémédiablement changé et qu’il est maintenant impossible, pour moi du moins, de déterminer ce qui la nourrit, ce qui l’anime et la fait évoluer. 

Il semble pourtant me rappeler que, d’antan, elle suivait des mouvements clairs et déterminés par une sorte de zeitgeist quelquefois éphémère mais toujours indéniable!

Histoire de ne pas ennuyer à mort les plus jeunes d’entre vous avec les anecdotes d’un autre siècle, je ne vais pas revenir sur une histoire maintes fois mieux contée ailleurs ! 

Qu’il soit simplement dit ici que l’avènement de ‘MTV’ a, entre autres, permis la pérennisation d’un système qui fabriquait des stars aussi vite que les modes pour la pop, le rock ou le rap se renouvelaient.

Et puis ?

Et puis « Boum »

Là encore, pas la peine d’en faire un essai de 300 pages : Internet est arrivé.

 

Depuis, la lente érosion du système mentionné plus haut a été inéluctable, et ce, alors qu’il semblait éternel : les vieilles combines de surenchère de Madonna génèrent maintenant plus de pitié que de ‘like’ sur Instagram.

Bien sûr, cela ne veut pas dire que la machine à recycler n’a pas continué à fonctionner à plein (You)tube ! Et selon votre sensibilité, vous pouvez sans peine trouver sur la toile le dernier ersatz en vogue de votre période préférée...

C’est d’ailleurs cette abondance illimitée de ressources qui a fini par donner à la musique cette instabilité erratique et hyperactive qui la caractérise aujourd’hui : personne ne sort du lot, car il est devenu quasiment impossible de cristalliser durablement une époque qui ne cesse de se réinventer au gré des trends.

 

Vous l’aurez compris, j’ai trouvé une exception.

 

Il y a sans doute un épiphénomène qui n’a pas changé...Et qui ne changera jamais : le besoin de se rattacher à quelque chose de plus grand que soi-même...

C’est, selon moi, ce qui guide la plupart des démarches artistiques, et musicales notamment : communiquer une somme d’émotions pour en faire collectivement la catharsis.

Ce qui m’amène enfin au sujet : Billie Eilish.

 

Ceux qui me connaissent vous diront sans trainer que consacrer un billet sur elle est à peu près aussi cohérent avec mes prédilections que si je décidais de parler de l’art et la manière de décorer ses ongles, mais que voulez-vous ? Ma sensibilité musicale est à peu près aussi flexible qu’une gymnaste russe...

Je ne vais pas perdre mon temps à tenter de définir sa musique : sa pop immédiate est d’une efficacité redoutable... Mais je conviens sans problème que c’est sujet à débat… Ce qui l’est moins, c’est le message inspirant qu’elle offre à toute une génération. (J’y viens dans quelques instants.)

 

Eilish avait déjà piqué mon intérêt en devenant autre chose que la quasi-totalité de ses congénères (c’est-à-dire une star des réseaux sociaux qui fait de temps en temps de la musique ou vice-versa) : une nouvelle itération de ce qu’on appelait une « popstar » au 20ème siècle.

Parce qu’il convient de bien comprendre ce que j’essaie de dire, je vais insister :

Loin de moi l’idée de dire qu’il n’y a plus de « Star » dans cet ère 2.1 -le concept a même explosé à outrance ; mais l’idolâtrie telle qu’on la connaissait il y a 30 ans (qui parait d’ailleurs presque innocente aujourd’hui) a bel et bien disparu.

De fait, son avènement avec « When we fall asleep, where do we go ? » me semblait être une sorte d’anomalie, une résurgence d’un concept hors de son temps.

Néanmoins, à voir et entendre les milliers d’adolescent(e)s reprendre en hurlant ses paroles, l’empêchant presque de chanter concert après concert, le doute n’était pas permis : je me trouvais bien face à un phénomène qui, au mieux, était en phase terminale ; maintenu moribond par quelques influenceurs.

Une partie non négligeable de la planète a tout à coup accordé une importance immodérée aux moindres paroles et gestes de la jeune femme, la proclamant porte-parole d’un mouvement trop informe pour être défini : entre les votants aux ‘Grammy Awards’ consacrant son album et une horde de followers sur Instagram pendus aux moindres fluctuations de la nuance de vert de ses cheveux ; Billie Eilish a rapidement eu le monde, dans tout ce qu’il lui reste de réel ou virtuel, à ses pieds.

En clair, elle aurait pu sortir à peu près n’importe quoi ensuite et l’illusion du succès aurait perduré certainement encore des années...

(Petite parenthèse pour dire que, une fois n’est pas coutume, je partage l’avis de beaucoup : il n’y a qu’un seul autre artiste dans l’histoire musicale récente à avoir reçu la même bénédiction maudite.

Ouais, je parle de Cobain.

Je ne vais pas m’étendre inutilement sur la comparaison, là encore, ce postulat a été maintes fois débattu ailleurs...

Mais cela valait incontestablement la peine de le noter… Fin de parenthèse donc !) 

Je confesse donc que j’étais assez curieux de voir ce que le duo (son frère est dans l’ombre, mais a une part prépondérante dans son succès) ferait du crédit accordé par ce panel allant de la génération Y à Z en passant par les ‘millennials’.

 

Le moins que l’on puisse dire, c’est que je n’ai pas été déçu : « Happier than ever » prouve avec brio que la blonde sait où elle va, et surtout, où elle ne veut pas aller.

En effet, son deuxième LP, loin de verser dans la surenchère ostentatoire ou de réutiliser une recette éprouvée, est avant tout une chronique de tout ce qui a changé dans sa vie ces deux dernières années… Chronique qui, pour tracer un autre parallèle improbable, n’est pas sans me rappeler la formidable introspection sur le succès à laquelle se livrait Kendrick Lamar sur ‘DAMN’… Bref.

Choisissant de traiter son album comme un exutoire des innombrables injonctions qu’elle subit (et par extension, que subissent les femmes de sa génération) Eilish y livre un compte rendu souvent touchant, parfois glaçant de sa notoriété fulgurante.

La sincérité et la percussion des images qu’elle invoque en font un témoignage passionnant, celle d’une jeune femme qui essaye de vivre une vie normale dans des circonstances dignes d’Orwell.

Sans jamais pleurnicher, avec une saine dose de révolte, elle questionne la manière dont elle est scrutée ; passant en revue ses aspirations dans un schéma de pensée qui exhorte à l’amour-propre et au respect de soi-même.

Sans prêcher, elle s’efforce de déconstruire le discours anxiogène imposé aux ados qui doivent avoir démystifié leurs envies sans même avoir eu le temps de vivre.

Pour cette raison et pour d’autres (notamment une production qui a le bon goût de ne pas être boursoufflée tout en brassant les genres et les influences),et nonobstant quelques passages poussifs, cet album mérite qu’on lui prête une oreille attentive ; que l’on dépasse les préjugés qu’on pourrait avoir pour une gosse populaire en 2021 pour y découvrir (ou pour y confirmer, c’est selon) que cette jeunesse a décidément des choses intéressantes à dire !

 

 

En vous remerciant, bonsoir !

criTiQue 0036 : il n'en restera qu'un !



Salutations,

 

 

Parlons un peu de Yorick Brown...

Un quidam ayant tout du prototype de l’homme/enfant tel qu’on en voit à tous les coins de rues de toutes les villes du monde. Somme toute un bon gars, qui essaye d’être gentil, qui cherche sa place dans cette société aux codes complexes et versatiles.

Ce ‘monsieur-personne’ va pourtant recevoir la chance dont plus d’un n’ose même pas rêver : être le seul homme parmi toutes les femmes sur terre !

Vous pensez peut-être que je suis sur le point de vous parler de la dernière production « Dorcel », et ce n’est pas sans une légère pointe de regret que je me vois obligé de vous désabuser de cette notion.

Nous sommes en fait devant une série apocalyptique.

Vous me direz, l’un n’empêche pas forcément l’autre ; mais pas l’ombre d’une livreuse de pizza un peu trop entreprenante ici…Non, on est sur de la bonne vieille maladie inconnue qui décime tout un pan de la population mondiale.

C’est bien simple, aucun mammifère possédant un chromosome Y n’y échappe.

 

Enfin si, justement, et même deux ; puisque Yorick et son singe ‘esperluette’ ont étrangement été épargnés.

 

Alors, autant être clair : on n’a pas hérité d’une flèche !

Ce brave Yorick, tout brave qu’il est, n’a pas du tout l’étoffe d’un sauveur. Et ce n’est pas grave…C’est même très bien, car on n’est pas ici sur un cheminement qui amènera le dernier représentant de la gente masculine à s’élever au-dessus de sa condition de bourse-molle pour venir au secours de femmes en détresse.

Au contraire, le premier épisode est plutôt prétexte à brosser une série de portraits masculins qui, loin d’être à charge, sont autant de subtils exemples du comportement toxique que les hommes adoptent avec les femmes de manière souvent désinvolte.

The #FemaleGaze is strong with this one et c’est tant mieux !

 

Au-delà de ça, on est sur un récit de fin du monde de facture assez classique avec un lent teasing de la catastrophe à venir tout au long de l’épisode qui permet de bien installer les personnages. J’ai tout de même apprécié cette énième variation du thème parce qu’elle reste à hauteur des personnages : on est aussi surpris, aussi horrifié qu’elles quand l’inexplicable se produit et on les suit effaré alors qu’elles assistent impuissantes à la mort de leur ami/conjoint/amant/père/enfant/chien…enfin, vous voyez quoi…

Diane Lane (la maman de ‘Superman’ dans le pas apprécié à sa juste valeur « Man of Steel ») brille particulièrement dans cet ensemble presque essentiellement féminin avec un jeu dont les fluctuations du visage au gré de ses émotions étaient particulièrement touchantes.

 

Reste qu’à part la méconnue « Falling Skies », je n’ai jamais vu une série sur une hypothétique apocalypse tenir la distance (assertion qui, à mon sens, ne peut être mieux personnifiée que par « The walking dead » dont l’étirement en longueur en a zombifié la trame dans une sorte d’analogie à sa représentation du pourrissement des corps rencontrés par les protagonistes).

Je suis donc sceptique sur le fait que « Y : le dernier homme » puisse faire mieux. Si elle réussit à se centrer sur ces personnages féminins, histoire de ne pas nous donner une revisite de « gardons cet homme en vie, il est la clé d’un remède », capitalisant sur sa force ; elle a une chance.

Mais quelle est sa force ? (me demanderez-vous...)

Sa force est de pouvoir profiter d’un précepte fort et, donc, de pouvoir le transformer en commentaire social pertinent.

En effet, la question se pose : comment se comporterait une société entièrement débarrassée de Mâle ? (avec un grand ‘M’) Au-delà des défis logistiques présentés (la disparité des genres dans certains métiers ne pourra que causer des problèmes), la série pourra alors s’attaquer à la question à mille dowlaaar et y apporter une réponse avec un point de vue exclusivement féminin :

Est-ce que l’humanité a un futur sans hommes ?

 

 

En vous remerciant, bonsoir !

criTiQue 0035 : on se connait ?

 


Salutations,


 

Si on devait faire un bilan de ces deux premières décennies de divertissement grand public, ce serait difficile de ne pas mentionner la contribution du scénariste David S. Goyer.

Relativement inconnu pour le spectateur lambda, on peut pourtant dire qu’entre deux itérations de Batman (pour Nolan et Snyder), Blade, Terminator et Superman ; pour le meilleur et pour le pire, le bougre a été prolifique.

Car figurez-vous que rien que dans les années 2000, entre tous ces monuments de l’entertainment, notre homme a trouvé le moyen de créer, produire ou écrire sur pas moins de 7 séries.

Là aussi, les résultats n’ont pas toujours été probants, mais je m’en voudrais de ne pas mentionner le véritable bijou dont il est l’un des cerveaux : en effet, dans la liste des séries dont l’annulation est une plaie qui ne cicatrisera jamais vraiment, « Flashforward » se place dans le haut du tableau. Et si vous aimez qu’une série vous mette la caboche à l’envers, il y a fort à parier que celle-ci a ce qu’il faut pour que vous en rendiez à votre tour un culte.

 

Mais venons-en au fait : cette fois-ci, Goyer a choisi de s’attaquer à un monument de la littérature S.F , « Foundation » pour ne pas la nommer, avec pour ambition avouée d’en retranscrire l’abondance de détails avec toute la minutie permise par la télévision. 

Première constatation : les moyens mis à sa disposition pour se faire devaient ressembler de près ou de loin à un chèque en blanc.Dès le générique, on est mis au diapason : c’est une orgie visuelle qui nous attend ! 

Effectivement, rares sont les plans où on ne sent pas la volonté d’en mettre plein la vue tout en nous baignant les oreilles dans une élégante musique...En cinq mots comme en cent : la série est un monstre d’opulence.

 

Reste à savoir si cet étalage peut réussir à se mettre au service de l’histoire.

 

C’est toute la difficulté de ces épisodes qui ont la lourde tâche d’ouvrir une série à l’intrigue tentaculaire : il faut faire les présentations en réussissant à créer l’empathie, exposer la situation en peignant un tableau compréhensif et lancer l’intrigue en piquant l’intérêt…Tout ça en 1 heure…

A ce jeu, notre brave David ne s’en sort pas trop mal : gardant en tête que les personnages et les lieux sont pléthoriques, il fait expertement passer ses personnages par toutes les étapes de l’introduction sans véritables fausses notes.

Mais sans coup d’éclat non plus.

 

Au final, j’en reviens souvent au même constat avec ces séries tirées d’œuvres littéraires : elles sont un pari que vous faites sur l’avenir.

Selon votre propre sensibilité, vous devez décider sur une situation initiale souvent vue et revue (une société totalitaire, des factions rebelles, la fin du monde annoncée…vous voyez le tableau) si vous avez envie d’investir du temps dans une histoire qui se révèlera bonne…ou pas…

Le dernier exemple en date, en ce qui me concerne, était que j’ai choisi de continuer à regarder « Shadow and Bones » qui, après un départ poussif, a fini par emmagasiner assez de traction pour provoquer une attente impatiente de la saison 2. (Si l’implicite n’est pas votre tasse de thé, je vais être plus clair : je vous la conseille.)

Il semble que ce sera également le cas pour « Foundation » : le deuxième épisode offre déjà beaucoup plus de place aux personnages pour se mouvoir dans l’intrigue, pour se dévoiler et grandir dans ce riche canevas.

En parlant de personnages, je me dois d’insister sur le fait qu’on est également confronté à une autre difficulté inhérente au genre : entrer sans indication dans un univers où on balance 3 noms et 4 mondes à la minute...A ce propos, je ne me suis pas posé 36 questions : la prise de note a fait ses preuves avec ‘DARK’ et j’ai pris sur moi de consigner tout ce qui ressemblait de près ou de loin à un nom propre, histoire de ne pas me perdre dans l’histoire...Mais vous voilà donc prévenu : on a quelquefois l’impression de jouer à un ‘qui est-ce ?’ intergalactique en regardant le premier épisode.

 

Tant qu’on y est, petit mot sur le casting où on retrouve Alfred Enoch (Dean Thomas pour les intimes) dont j’ai le regret de dire qu’il ne fait pas un travail inoubliable.

Lee Pace, de son côté, me laisse entre amusement et appréhension : après ‘Thranduil’ et ‘Ronan l’accusateur’, je suis forcé de conclure en constatant qu’il joue à nouveau un psychopathe, que l’annulation de « Pushing daisies » (géniale série de Bryan Fuller) l’a définitivement dégouté de jouer sur sa corde sensible. J’espère que l’absence de maquillage pour ce rôle de ‘Frère au Grand Jour’ lui inspirera un jeu plus en nuance que pour ses incursions dans l’univers de Tolkien ou dans le ‘MCU’.

Rien à redire sur Jared Harris (le 'Moriarty' du 'Sherlock Holmes' de Robert Downey Jr.) qui semble être en pilote automatique avec ce rôle de mathématicien/prophète apocalyptique.

Quant à Terrence Mann, c’est avec plaisir que je le retrouve après avoir adoré être terrifié par lui dans « Sense8 ».

 

 

Pour conclure, c’est donc sans trop de réserve que je vais continuer à me repaître du visuel de cette série qui a bel et bien le potentiel de devenir la grande saga qu’il ambitionne d’incarner.

 


 

En vous remerciant, bonsoir !