criTiQue 0037-38 : Battle Royale

Pré scriptum : Comment ? Oui, je vous pose la question : Comment éviter de parler de « Squid game » ?
Pas possible ?
Bon ok, puisque Mr Hollywood…
Attendez… Ça me fait penser… Mr Hollywood a certainement changé de nom ces dernières années : il se fait sans doute appeler ’Mr Streamy’ maintenant !
On reprend donc :
Puisque Mr Streamy a trouvé le moyen de tous nous forcer à considérer le ‘jeu du calamar’ comme un objet de curiosité, je ne vais pas vous laisser tomber ; je vais vous aider à répondre à la seule question qui mérite d’être posée : est-ce que « Squid game » vaut la peine d’être regardée ?
Pour se faire, je vous propose de rester dans le thème en organisant une ‘Battle Royale’ !

Aujourd’hui, dans mon salon, c’est :

« Squid game » VS « Alice in borderland » !!

Les deux séries partent exactement du même principe : des participants à un jeu tordu se font zigouiller s’ils ont la mauvaise idée de perdre…
Etant sorties à moins d’un un intervalle, ça me paraissait un juste retour des choses de les faire s’affronter dans un combat à mort !
J’ai donc regardé le premier épisode de mes deux concurrents et ma sentence sera irrévocable (comme dirait l’autre) : je n’en continuerai qu’une !





Salutations,



A tout seigneur, tout honneur !
« Squid game » est devenu la série la plus regardée de Netflix cette semaine : près de 111 millions de personnes ont visionné au moins un bout de la série au cours de ses 17 premiers jours de disponibilité ! Oui madame, rien que ça !
(Au passage, je précise qu’elle a détrôné la série « Bridgerton » dont l’histoire tient en une question existentielle : « comment le personnage joué par Regé Jean-François (ou peu importe son nom…) en est venu à inventer la contraception pour homme ? »)

C’est donc avec ‘SG’ que je vais ouvrir le combat :
On suit les déboires de Seong Gi-hun dans un portrait qui ne s’embarrasse pas de nuances : cet homme est un raté dans tous les sens du terme.
Je l’ai déjà dit maintes fois (et je le redirai encore) : l’enjeu primaire pour moi quand je regarde une série, c’est de savoir si je peux m’accrocher aux personnages, développer une empathie pour eux qui me pousse à continuer de regarder l’histoire dont ils font l’objet.
C’était ma crainte principale avant d’appuyer sur ‘play’ et je dois dire qu’elle était largement infondée : qu’est-ce qu’il est attachant ce con !
Pas de problème, donc, de ce point de vue-là : quand il en retourne que notre parieur invétéré s’est mis dans des draps sur lesquels je n’oserais pas mettre le chien de mon pire ennemi, on ne manque pas d’envie de voir comment il va s’en sortir.
Le hic, c’est qu’on n’a pas vraiment le temps de s’en faire pour notre couillon de service.
Il est enlevé, et alors qu’on devrait commencer à baliser ; on comprend tout, tout de suite : bien sûr qu’il est prisonnier et, évidemment qu’il va devoir ‘jouer’ ! On sait 10 minutes avant lui ce qui l’attend et ça ne me dit rien qui vaille !
Bon, ce n’est pas encourageant, mais je m’accroche : cette série n’a certainement pas été regardée 111 millions de fois pour si peu !
Il doit y avoir quelque chose dans cette histoire de tellement dingue, de tellement profond que je suis sur le point d’avoir un retournement de nouille presque transcendantal !
Mais c’est là que le proverbial bât a blessé : j’ai eu beau essayer, j’ai eu du mal à voir quelque chose de transcendantal dans cette série qui m’a semblé plus préoccupée à passer en revue sa série de ‘check point’ qu’à raconter une histoire :



-Esthétique pop immédiatement reconnaissable (et future ‘it’ costume pour halloween) : check !

-Détournement de jeu enfantin pour créer un décalage malsain : check !

-Ralenti systématique à grand renfort d’hémoglobine : check !

-Personnage masqué bien glauque et drapé de mystère qui semble se délecter du spectacle : check !

-Un ensemble de personnages dont le profil (entre autres : une bonne poire qui veut revoir sa fille, un intello à lunettes qui va trouver les failles, une nana badass au passé trouble, un criminel prêt à tout pour partir et un petit vieux qui n’a plus rien à perdre) sont autant de clichés taillés au millimètre pour que les trahisons les uns envers les autres soient tantôt tragiques, tantôt jouissives mais rendues inévitables par la survie…(check !)


Bon, je pousse un peu. Soyons de bon compte : cette petite liste fait le taf et il ne faut pas être grand clerc pour comprendre pourquoi la série fait un tel buzz.
On a donc un personnage sympathique et une série de check-points pour trend rapide qui a valeur de cahier des charges réussi : cela donne un show divertissant… Mais est-il pour autant indispensable à regarder ?
Vous l’aurez deviné (ou pas), pour moi, la réponse est non.
Car je n’ai pas mentionné « Battle royale » dans le titre juste parce que ça faisait cool : cela fait maintenant presque 20 ans que le film est sorti en Europe et, depuis cet objet culte (que je vous conseille) a été l’inspiration de nombreux ouvrages visuels.
Ce n’est pas un problème en soi que ‘SG’ l’expose aussi ostentatoirement comme partie fondatrice de son ADN mais pour qu’une série qui revisite les thèmes développés dans son œuvre séminale en vaille réellement la peine, il faut qu’elle soit une valeur ajoutée au propos, qu’elle en fasse une relecture pertinente, moderne ou un tant soit peu subversive.
La conclusion s’impose d’elle-même : non seulement je ne pense pas que ce soit le cas, mais qui plus est ; je doute fortement que la suite, au-delà de tous les rebondissements et de l’horreur qui sont à coup sûr au programme, puissent me faire changer d’avis.
Seule la perte inévitable de l’innocence de ce brave Seong Gi-hun et le fait d’être témoin de sa mue, probablement à la toute fin de la saison, me semble modérément intéressante… Cela pourrait me pousser à la curiosité, mais ça dépendra de facteurs complètement extérieurs à la série (à savoir : si j’ai du temps à perdre !)

Voilà pour « Squid game »…Voyons si son adversaire du jour se débrouille mieux :



En démarrant « Alice in borderland », difficile de ne pas constater qu’on est également parti sur des clichés faciles : le gamer sans notion d’avenir, la petite frappe aimant à problème et le fonctionnaire en train de mourir d’ennui.
Mais ce sentiment ne perdure pas : une scène sans paroles de 30 secondes vaut parfois une exposition de 15 minutes et c’est le cas ici : l’installation se fait rapidement, à l’aide de quelques scènes bien calibrées, presque belles ; on devine la profonde amitié de nos 3 comparses avant que tout bascule.
Cette faculté d’évoquer du ressenti rien que sur le visuel me laisse une meilleure impression ! Et elle continue de s’affirmer quand le mystérieux évènement initiateur de l’histoire se produit: le moment de silence presque total alors que nos anti-héros découvrent qu’ils semblent tout à coup être complètement seuls dans leur mégapole est plus parlant que beaucoup de longs discours.
Reste à voir où cela mène… Ou pas en fait car, ici, le mystère prédomine ! On ne comprend pas tout de suite ce qui se passe et ça aide grandement à l’immersion : on est aussi confus que les personnages, on découvre leur condition en même temps qu’eux.
Pas pressé d’en venir au fait, la série prend le temps d’ancrer les protagonistes dans leur nouvel environnement. On les voit revisiter leurs anciennes vies tels des fantômes, et on n’est pas très sûr de savoir s’ils sont seuls ou invisibles ; là encore, le visuel laisse la place à l’exposition au lieu d’un quelconque dialogue ! Cette série comprend décidément son potentiel dramatique, elle ne ressent pas le besoin de s’appuyer sur des artifices trop lourds (par exemple, mais au hasard hein ! Des costumes au visuel claquant…) et c’est salutaire, car on reste au fond sur une histoire déjà vue et revue.
Mais quelle histoire en fait ?
La survie pardi !
Ici pas de méchant masqué qui observe avec son whisky 50 ans d’âge (pas dans ce premier épisode du moins), tout se fait de manière impersonnelle, à travers des écrans.
Ils représentent une présence écrasante, omnisciente. Ils sont partout, tout le temps ; ils sont une ligne de vie et le vecteur de l’angoisse. La menace qu’ils incarnent reste donc diffuse et cela renforce la confusion : au-delà des évidences (les enjeux de survivance ou de trépas immédiat) impossible de comprendre ce qu’il se passe réellement, et encore moins qui ou quoi se cache derrière ce cauchemar.
Mieux encore, le timer qu’ils exhibent infuse une bonne tension, on est ici dans une sorte de « Cube » (1997…ça date pas d’hier non plus ! mais coup d’essai, coup de maître pour Vincenzo Natali) sous stéroïde et cela fonctionne du tonnerre !
Tout ceci étant dit, on reste bien évidemment sur les mêmes dilemmes éculés : « oooh mon humanité m’empêche de faire ce que je dois faire pour survivre… » *5 minutes plus tard* « …RAF, t’as qu’à crever, bâtard ! »
Et, au final, restons honnêtes : cette série, pas plus que la précédente, n’a, je pense, le potentiel d’apporter une relecture du genre.

Mais il y avait match, et je dois décider du vainqueur…

Le doute ne devrait pas vous être permis en arrivant à ce stade (je profite de l’opportunité pour m’excuser de la longueur de ce billet) : j’ai été plus convaincu par la deuxième variation du thème ! (Sans, pour autant, être réellement conquis...)
Reste donc à voir si « Alice in borderland » peut tenir les promesses qu’elle fait!
L’espoir est permis : la fin tease (on reste dans la suggestion) qu’on est dans une histoire plus large, semblant indiquer que le show en a gardé sous la pédale.
Néanmoins, je dois convenir que le style est fragile, et l’ensemble peut tout à fait s’écrouler comme un château de cartes au moindre effet de manche trop facile.
Mais, ici, point de prédiction facile ! Pour connaître la suite, une seule solution :
Continuer à regarder !


En vous remerciant, bonsoir !

1 commentaire:

  1. Salutations cher ami. Après avoir dévoré Squid Game sans modération (et un petit détour par les 3 saisons de "You ") je viens de m'attaquer à Alice et je ne suis pas prêt à la lâcher. Merci beaucoup tes critiques. Ton ton 😂 est intéressant et tes punchlines percutantes (d'où le terme punchlines 🙄) A bientôt !

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